L’échographie en médecine générale: «la plupart des radiologues sont réticents»

De plus en plus de généralistes utilisent l’échographie au cabinet dans leur pratique. Ils seraient entre 150 et 200 francophones aujourd’hui. Une démarche qui repose sur des preuves scientifiques comme le rappelle le Dr Vincent Parmentier de la SSMG 

«J’en réalise depuis 8 ans, tous les jours. Il faut savoir que la Belgique et l’Irlande sont à peu près les deux seuls pays européens qui n’ont pas de législation et de cursus d’apprentissage pour les généralistes ou même d’adaptation de nomenclature pour que d’autres spécialités que les radiologues puissent en faire.»

La littérature scientifique encourage cette pratique: «Depuis 50 ans, des études cliniques montrent que des généralistes savent faire des échographies dans certaines conditions aussi bien que des spécialistes. Ces dernières années, il y a eu plus de 20.000 publications sur l’échoscopie réalisées par des non-radiologues. Même la Wonca a publié un "position paper" expliquant que le POCUS («point-of-care ultrasonography») devrait faire partie du cursus de base de tout généraliste et être intégré dans leur formation continue. A ce jour, il n’y a rien dans le cursus actuellement en échographie. Nous sommes d'ailleurs obligés de nous former à l’étranger car les radiologues, en Belgique, sont réticents à nous apprendre» ajoute-t-il.

Plusieurs formations possibles
En Belgique francophone, il existe plusieurs possibilités de suivre des formations comme à la SSMG, à l’ULiège, chez Dynamecho ou chez Ebecho par exemple. «A la SSMG, depuis 2017, nous donnons des formations en échoscopie clinique. Nous faisons plus d’une dizaine de formations par an, tant pour les généralistes et les spécialistes que pour les assistants en médecine» précise le Dr Parmentier. 

De son côté, le Dr Pierre Nys, médecin généraliste depuis 1993 a intégré,  l’association Ebecho, pour transmettre ce que l’échographie lui apporte dans son quotidien. «Cela nous permet d’agir dans une démarche clinique plus proactive tout en restant dans une cohérence clinique.»

Au total y aurait entre 150 et 200 généralistes francophones formés aujourd’hui. 

L’une des questions centrales dans la pratique quotidienne est évidemment celle de la formation: «Quand j’ai un doute. J’envoie à mon confrère radiologue. Il faut garder de l’humilité. Plus d’une fois, je détecte avec ma sonde des pneumonies que je n’entends pas. Cela donne un appoint. Cela me permet de dire: «non je ne met pas d’antibio car il n’y a pas de foyer.»

Pour le Dr Parmentier, l’échographie clinique ciblée «permet de répondre à une question clinique «Oui ou on». Ce n’est pas une échographie descriptive comme peuvent la faire les radiologues.»  Il ajoute une précision importante: «J’ai l’habitude de dire qu’il s’agit du 5eme pilier de l’examen clinique: inspection, auscultation, palpation, percussion et l’échographie permettent d’augmenter la puissance clinique.»

Parler avec les radiologues
Sur le terrain des tensions existent inévitablement avec les radiologues: «Je ne vais évidemment pas faire une écho comme un radiologue, je n’ai pas sa compétence.» précise le Dr Nys.

Il rappelle la démarche particulière du généraliste: «Je pars d’une histoire prolongée d‘un examen clinique. Puis  je vais répondre à une question à l’aide de l’echo-clinique. «Ai je une une cholécystite?» Avec l’échographie, je peux voir  une vésicule dilatée, épaissie et voir la présence ou non d’une lithiase.» 

Travailler ensemble
Le Dr Parmentier prône aussi un dialogue avec les radiologues: «La plupart sont réticents. Ils ont des arguments et nous avons les nôtres. Nous sommes complémentaires.» 

Pour lui, la santé publique a un intérêt à ce que «notre pratique se fasse dans les meilleures conditions afin d’apporter la plus-value décrite dans les études cliniques: Réduction des coûts, diminution de l’attente et l’errance du patient, de ses trajets et surtout de recours exagéré à la deuxième ligne de soins. Pour les radiologues, cela leur permettrait de se concentrer sur des échographies de plus grandes valeurs ajoutées. Bien sûr, cette vision des choses va à l’encontre de certains modèles économiques privés. Il faut oser l’aborder.»

> Lire aussi: Echographie en MG: «il y a un combat à mener pour une reconnaissance»

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Derniers commentaires

  • Christian DELCOUR

    31 octobre 2023

    il n’est simplement pas logique que la nomenclature ne puisse distinguer une echographie autoprescrite sur appareil financièrement très accessible versus une examen spécialisé sur une machine onereuse , réalisé par un spécialiste en imagerie selon des critères de qualité définis, obligation d’archivage sur un pacs etc…
    On ne compare donc pas deux examens identiques