La dysmorphie Zoom, une nouvelle entité nosologique liée à la pandémie

Le télétravail a augmenté de manière exponentielle le recours aux téléconférences durant la pandémie. Zoom estime ainsi que la participation quotidienne à une réunion est passée d’environ 10 millions en décembre 2019 à plus de 300 millions en avril 2020 (77% avec un ordinateur portable ou de bureau, 31% avec un téléphone mobile et 13% avec une tablette), ce qui a généré selon les dermatologues une augmentation significative du nombre de patients qui se présentent avec une perception négative de leur image.

Arianne Shadi Kourosh (directrice du centre d’esthétique au laser et de chirurgie au Massachusetts General Hospital de Boston) qui présentait au cours du congrès américain de dermatologie une étude récemment parue (1) a constaté dans ce sens qu’«à mesure que la dépendance à l’égard des appels vidéo augmentait, le nombre de consultations cosmétiques pour ce que nous appelons une dysmorphie Zoom a explosé. Et cette dysmorphie qui consiste en une perception négative ou biaisée de l’image corporelle résulte de la prolongation du temps passé sur les appels vidéo».

Dans une enquête menée auprès de plus de 100 dermatologues, les auteurs ont constaté que 86% des dermatologues interrogés qui faisaient part de ces préoccupations esthétiques ont indiqué que leurs patients faisaient référence à la vidéoconférence comme raison de la consultation esthétique. L’augmentation du temps passé devant la caméra, conjuguée aux effets peu flatteurs des caméras frontales, a déclenché une réaction inconsciente nouvelle, liée notamment au fait que passant beaucoup plus de temps sur les médias sociaux à visionner des photos (souvent retouchées ou choisies spécifiquement pour leur aspect esthétique) d’autres personnes, cela a déclenché des comparaisons malsaines avec leurs propres images émises par les caméras frontales.

Les préoccupations les plus couramment exprimées concernent les rides du haut du visage (77 %), les cernes sous les yeux (64,4 %), les taches foncées (53 %) et l’affaissement du cou (50 %)(Figure), toutes manifestations exacerbées par l’angle de la caméra, la longueur focale et la distorsion de l’ombre.

© Rice S, Siegel J, Libby T, Graber E, Kourosh A. Zooming into cosmetic procedures during the COVID-19 pandemic: the provider’s perspective. Int J Women Dermatol. 2021;7(2):213-216.

Prévenir plutôt que guérir
Il faut être conscient des limites de la technologie et de son potentiel impact sur notre image, raison pour laquelle les auteurs de cette étude conseillent pour combattre la dysmorphie Zoom :

  • d’évaluer la technologie en utilisant autant que possible une caméra externe haute résolution pour obtenir une vidéo de qualité et en y ajoutant une source de lumière en anneau pour contrôler la façon dont le visage est illuminé.
  • d’ajuster l’appareil photo en positionnant l’écran à une distance plus éloignée du visage et en maintenant la caméra au niveau des yeux, afin de minimiser la distorsion provoquée par la caméra.
  • de protéger la santé mentale en réduisant autant que possible le temps passé à se regarder à travers une caméra frontale et à éteindre la vidéo lors des appels lorsqu’elle n’est pas nécessaire.
  • de limiter le recours aux médias sociaux ou, à tout le moins, d’être conscient du fait que l’édition de photo y est omniprésente et qu’il est malsain de comparer les images déformées par les caméras frontales aux photos éditées et mises en ligne.
  • de recourir si nécessaire à un professionnel de la santé mentale, pour apprendre une méthode saine d’apprécier son apparence et offrir des stratégies de réorientation à ceux se concentrent sur des déformations physiques artificielles.
  • de consulter un dermatologue capable de recommander des produits de masquage plutôt que des interventions esthétiques invasives si le problème est réellement préoccupant pour la personne qui consulte.
  • 1. Rice S, Siegel J, Libby T, Graber E, Kourosh A. Zooming into cosmetic procedures during the COVID-19 pandemic: the provider’s perspective. Int J Women Dermatol. 2021;7(2):213-216.

Vous souhaitez commenter cet article ?

L'accès à la totalité des fonctionnalités est réservé aux professionnels de la santé.

Si vous êtes un professionnel de la santé vous devez vous connecter ou vous inscrire gratuitement sur notre site pour accéder à la totalité de notre contenu.
Si vous êtes journaliste ou si vous souhaitez nous informer écrivez-nous à redaction@rmnet.be.

Derniers commentaires

  • Thérèse RICHE

    13 octobre 2021

    Bien, n'abusant pas de "ZOOM", je crois que c'est l'isolement qui a accentué l'image négative de moi-même.....
    comme la vision des photos du 51e anniversaire de diplôme de médecin....Quel coup de vieux!
    J'ai l'air de rire, mais vrai, j'ai pensé à une consultation esthétique mais bon, à mon âge....trop tard!