Revue de la médication : que penser de cette nouvelle initiative ? (Dr Luc Herry)

La revue de médication par le pharmacien est désormais une possibilité établie. Mais que penser de cette nouvelle iniative ? En attendant les résultats d'une enquête de l’UCLouvain sur ce sujet, le Dr Luc Herry (ABSyM) nous livre quelques réflexions.

L’ABSyM n’est absolument pas favorable à ce que le pharmacien puisse modifier les traitements des patients.  « Notre système de santé repose sur une distribution adéquate du travail et des compétences » rappelle avec fermeté le Dr Luc Herry (ABSyM). « Le médecin examine le patient, pose un diagnostic et prescrit un traitement. Le pharmacien délivre les médicaments, est responsable de leur qualité et doit veiller à ce que leur prise par le patient soit correcte. Il a aussi un rôle à jouer pour contribuer avec le médecin pour déceler d’éventuelles contre-indications et interactions médicamenteuses. » Cette distribution des rôles suppose bien entendu un bon échange d’informations entre les deux acteurs. « Ce n’est pas gênant que le pharmacien soit informé sur le traitement du patient. Il est même normal qu’il soit rémunéré pour la revue de médication. Remarquons tout de même au passage que s’il y a échange d’informations avec le médecin, celui-ci y consacre un temps qui, lui, n’est pas honoré », souligne Luc Herry.

« Il est bon pour le patient et pour les deux professions que le pharmacien informe le médecin s’il a détecté une contre-indication ou un problème de dosage. » ajoute-t-il.  « Il est même probable qu’il soit mieux informé que le médecin de tout ce que le patient reçoit comme médicaments. Il a accès à ce que ses confrères ont pu délivrer au même patient, alors que nous, médecins, n’y avons pas accès en raison de l’incompatibilité des systèmes informatiques. Depuis peu, il est possible de voir ce que des confères ont prescrit pour un patient, mais pas ce qui lui a été délivré. »

Mais le Dr Herry insiste pour rappeler que le diagnostic et la décision thérapeutique appartiennent au médecin. « Une éventuelle modification du traitement faite d’initiative par le pharmacien serait chargée de risques. » Le pharmacien ne dispose pas de toutes les informations médicales. Or beaucoup de patients ont des comorbidités ou des pathologies intriquées. Ne pas en tenir compte serait dangereux. Et communiquer ces informations au pharmacien reviendrait à trahir le secret médical. Se lancer dans une modification du traitement risquerait aussi de brouiller les idées du patient, voire de saper sa confiance en son médecin. Et en cas de problème, comment pourrait-on déterminer les responsabilités ?

« En accordant au pharmacien des libertés qui dépassent ses compétences, on détruit les bases sur lesquelles repose notre système de santé. Médecin et pharmacien ont deux fonctions différentes et complémentaires. Utilisons-les chacune dans leur spécificité. » conclut le Dr Herry.

Pour la première fois, l'avis des médecins généralistes est demandé à travers une courte enquête (10 à 15 minutes) menée par une équipe de l'UCLouvain. Que pensent les médecins de cette initiative et plus particulièrement comment voient-ils la collaboration avec le pharmacien ? L'élaboration concrète de la procédure reste à faire. Pour pouvoir aller plus loin dans une bonne évaluation de ce que peut apporter la revue de médication, des avantages qu’elle peut procurer et des risques qu’elle comporte, l’ABSyM soutient cette enquête et invite chacun à y répondre.

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