La prévention quaternaire: une façon d’être et de pratiquer

«Celui qui maîtrise la prévention quaternaire maîtrise le budget des soins de santé», n’a pas peur d’affirmer le MG et chercheur Marc Jamoulle. Il signe un article dans la Revue Médicale de Bruxelles, alimenté par un panel d’experts de 12 pays et 3 continents. L’esprit de la prévention quaternaire, contrer les excès de la médicalisation, n’a manifestement pas de frontières.

Marc Jamoulle, médecin de famille en terres carolos, est titulaire d’un récent doctorat sur les «Q-Codes», une indexation spécifique à la médecine générale (lire Medi-Sphere n°577). Mais on le connaît aussi pour avoir patiemment fait germer en Belgique la notion de prévention quaternaire - souvent avec son confrère bruxellois Michel Roland - , laquelle a été avalisée en 2003 par la Wonca. 

Que désigne-t-on par prévention quaternaire (ou «P4»)? Le fait pour un médecin «d’identifier un patient (ou un groupe) à risque de surmédicalisation, le protéger d'interventions médicales invasives et lui proposer des procédures de soins éthiquement acceptables», définit l’orateur. Tenant de l’exigence éthique séculaire du primum non nocere, la P4 est une réponse aux situations dans lesquelles le patient invoque des symptômes tandis que le médecin n’arrive pas à objectiver une maladie. «Il n’y a rien de pire, pour un patient, que d’être réputé porteur de rien», écrit Marc Jamoulle. La prévention quaternaire recouvre le surdépistage, le surdiagnostic, la surmédicalisation, la surinformation, le surtraitement... Elle questionne ‘ces diagnostics étranges’ des ‘symptômes médicalement inexpliqués’, ‘syndromes somatiques fonctionnels’, ‘troubles somatoformes’… Elle reconnait l’incertitude comme une composante de la pratique médicale et admet les limites des soins.

En somme, la P4 amène le praticien à un autocontrôle qui l’empêche d’en faire trop. Un médecin traitant orienté P4 protégera son patient d’une cascade de services médicaux inutiles qui pourraient lui être proposés par ailleurs pour répondre à son anxiété. Autre principe éthique devant guider sa pratique clinique: il mènera une prise de décision partagée avec les patients, pour leur permettre de s'autonomiser.

La P4 possède du reste une dimension politico-économique. Si l’on considère les ressources limitées de l’assurance maladie et leur affectation (au remboursement d’examens techniques, de traitements…), en veillant à la pertinence des soins individuels et en prévenant la surmédicalisation, les MG «participent à la justice distributive», souligne le chercheur.

> La présentation de M. Jamoulle à l’AMUB est disponible en ligne.

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