Alcool sans Tabous : « Les généralistes ont un rôle  important de prévention envers les jeunes »

Le Dr Thomas Orban, alcoologue et généraliste vient de publier aux éditions Mardaga un ouvrage à destination des 12-35 ans, co-écrit avec Vincent Liévin, journaliste, intitulé « Alcool sans tabous ». Selon lui, le médecin généraliste ne doit pas attendre l’apparition de dommages pour aborder cette problématique. 

La  Société française d’alcoologie, et l’Institut national américain pour l’abus d’alcool et l’alcoolisme estime que  tout adolescent vu en pratique courante (bilan de santé, consultation en urgence pour un traumatisme, etc.) devrait bénéficier d’un dépistage portant sur sa consommation d’alcool. Pourtant, seulement 40,7 % des médecins pensent qu’il faudrait systématiquement aborder le sujet de l’alcool lors d’une consultation avec un adolescent. 

Comment aborder un jeune qui consomme de l’alcool  ? 

Dans son cabinet, le généraliste peut dialoguer avec les adolescents :  « Plus de 90 % des médecins pensent que la présence des parents est un frein pour parler d’alcool. Le médecin doit établir une relation de confiance avec son jeune patient, qui a besoin d’être écouté, pris au sérieux et rassuré. L’adolescent doit exposer lui-même le motif de sa consultation et ainsi avoir le rôle d’interlocuteur principal, sans que les parents ne soient totalement exclus. Le médecin doit leur accorder une écoute et une place suffisante, afin de les intégrer dans la relation de soins. Dans l’idéal, l’adolescent serait dans un premier temps reçu brièvement avec ses parents, puis vu seul pour permettre une anamnèse et un examen clinique dans une atmosphère d’intimité et de confidentialité ; les parents pourraient être reçus à la fin de l’entretien avec l’accord de l’adolescent. » 

L’alcoolisme est présent dans 46 % des cas de bipolarité

Évidemment, surtout en cette période post-covid, se pose aussi la question de la santé mentale et des antécédents familiaux de troubles psychiatriques et de suicides. « C’est important, car cela permet d’envisager un diagnostic, par exemple de bipolarité. En effet, la bipolarité a des aspects génétiques et s’accompagne très souvent de problèmes d’alcool – les patients bipolaires utilisent l’alcool comme un médicament et viennent consulter pour un problème d’alcool. Il y a par ailleurs les antécédents de tabagisme à prendre en compte, car l’alcool appelle le tabac et vice versa. Psychologues et psychiatres traitant des patients bipolaires ne posent pas toujours la question de l’alcool. Ce n’est pas normal! Bipolarité et alcool forment un tandem fréquent. Bien entendu, il serait faux d’affirmer qu’une personne alcoolodépendante est forcément bipolaire. Il arrive toutefois régulièrement de constater que des patients alcoolodépendants ignorent leur diagnostic de bipolarité. L’impulsivité est très importante chez les patients porteurs de cette pathologie duelle (alcool + bipolarité), il est donc conseillé d’encourager l’abstinence totale. L’alcoolisme est présent dans 46 % des cas de bipolarité. »

La question de la dépendance

Alors que le début de la consommation d’alcool à 17 ans est associé à une prévalence à vie de la dépendance à l’alcool de 28 %, cette prévalence passe à 38 % lorsque le début de la consommation d’alcool a lieu avant l’âge de 15 ans. « Même si tous les jeunes ne boivent pas d’alcool ni ne fument, l’alcool est un enjeu de santé publique. Dans la littérature, la consommation précoce d’alcool est généralement définie comme étant une consommation d’alcool avant 15 ans. Les résultats issus de l’étude European School Survey Project on Alcohol and Other Drugs (ESPAD), réalisée en 2015 dans trente-cinq pays, montrent qu’un adolescent sur deux (47 %) a déjà consommé de l’alcool au moins une fois à l’âge de 13 ans ou plus jeune. » 

Une maladie génétique complexe

D’autres études ont révélé que les comportements à risque apparaissent généralement au début de l’adolescence et se combinent entre eux. Par exemple, des adolescents consommateurs réguliers d’alcool adoptent en même temps un ou plusieurs autres comportements à risque, tels que la consommation de tabac, de cannabis ou les rapports sexuels non protégés.  « Le poids de la génétique (50%) sur l’alcoolisme en fait une maladie génétique complexe et hétérogène. Il s’agit d’un trouble quantitatif, dans lequel l’incidence combinée à de multiples facteurs génétiques et environnementaux varie d’un sujet à l’autre - coexistant avec d’autres dépendances et troubles psychiatriques . Nous analyserons également l’impact de ce produit hautement toxique sur leurs cerveaux. Car on oublie trop souvent que, avant 25 ans, le cerveau n’a pas terminé sa maturation. Or, la consommation d’alcool pendant l’adolescence endommage son développement de manière irréversible et prédispose largement à l’alcoolisme ou au mésusage d’alcool à l’âge adulte, ainsi qu’à toute une série de troubles psychologiques et comportementaux associés.

Cet ouvrage grand public, qui s’adresse tant aux adolescents qu’aux adultes et qui se veut un échange, un dialogue, pour s’entraider. Dans cette démarche dynamique, au fil des pages, on trouvera des témoignages, des conseils pratiques, des solutions pour continuer de s’amuser, des QR codes renvoyant à des vidéos pour éclairer autrement, avec d’autres mots, sur les principales problématiques liées à l’alcool. Les ados apprécieront particulièrement de pouvoir ouvrir un livre avec leur smartphone..


Mardaga; 1er édition (11 janvier 2023)
Langue ‏ : ‎ Français - Broché ‏ : ‎ 192 pages
ISBN-10 ‏ : ‎ 2804724557 - ISBN-13 ‏ : ‎ 978-2804724559
Format Kindle : 12,99 euros-Format papier : 19,99 euros
Dimensions ‏ : ‎ 14 x 1.12 x 22.5 cm

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