Des patients virtuels pour tester des traitements contre l'arthrose

© biomech

Dans le cadre d’un projet européen de collaboration, une équipe de chercheurs liégeois a pour ambition de s’attaquer à l’arthrose du genou en faisant appel aux dernières méthodes de la médecine in silico, celle qui utilise les modélisations informatiques. Ils ont en projet d’aller jusqu’à des tests sur des patients virtuels.  

Alors qu’un adulte sur sept souffre d’arthrose en Belgique, la médecine n’est toujours pas capable d’enrayer efficacement la progression de cette affection. Les travaux visant à mettre au point un traitement qui y parvienne sont extrêmement nombreux dans le monde. La médecine régénérative est l’un des grands axes de recherche. Elle vise à remplacer ou à réparer le cartilage abîmé en faisant appel à des cellules saines en état de fonctionner normalement. L’idée est de mettre au point des traitements qui évitent au patient la prise au long terme de médicaments et de retarder, voire d’éviter si possible la mise en place d’une prothèse. A l’Université de Liège, la Pre Liesbet Geris, avec  l’Unité de Recherche Biomécanique qu’elle dirige à la faculté des sciences appliquées (une collaboration avec la KULeuven), participe activement aux travaux du projet INSTant CARMA (In Silico Trials for Cartilage Regenerative Medicine Applications), récemment lancé par l’Union européenne.

Les travaux du groupe liégeois feront appel à la recherche in silico ou médecine computationnelle. Développée depuis quelques années, cette approche vise à modéliser, simuler et observer des processus biologiques, physiologiques et médicaux dans un environnement virtuel. La recherche in silico présente l’avantage de générer rapidement des milliers d’hypothèses différentes. Dans les domaines thérapeutique et pharmaceutique, elle produit et présélectionne des médicaments putatifs. Par le fait même, elle limite les besoins en expériences in vivo sur les animaux ou sur l’homme. La recherche s’en trouve accélérée et In fine, les coûts sont avantageusement réduits.

Dans un premier temps, les scientifiques liégeois et leurs co-équipiers vont s’efforcer de mettre au point un modèle virtuel qui simule l’apparition et la progression de la gonarthrose post-traumatique. L’objectif de cette première étape est de mieux comprendre la pathogénèse de cette affection. Par la suite, ils introduiront dans leur modèle des données de mécanique articulaire concernant le comportement du cartilage, de l’os et même des cellules et des molécules impliquées dans le phénomène arthrosique. Peu à peu, les facteurs responsables de l’arthrose et les combinaisons de ces facteurs seront ainsi mieux connus, ce qui devrait permettre d’entrevoir des méthodes préventives et thérapeutiques. 

Viendront ensuite des essais cliniques. Eux aussi seront conduits d’abord in silico, c’est-à-dire sur un groupe de patients virtuels. A ce moment-là, les chercheurs évalueront par voie informatique des traitements potentiellement actifs sur les facteurs repérés et étudiés dans les étapes précédentes. Plusieurs approches pharmaceutiques dégagées grâce au modèle informatique seront étudiées. Il est possible que cela aboutisse à de nouveaux médicaments. Mais il se peut aussi que des molécules actives déjà existantes s’avèrent utiles pour agir sur les facteurs mis en cause. La médecine computationnelle devrait pouvoir les détecter et l’équipe de Liesbet Geris explorera toutes les possibilités qui se dégageront. Si des résultats valables et utilisables sont obtenus in silico, il faudra les valider à l’aide de tests in vitro, sur des cellules animales isolées en laboratoire, et in vivo, sur des animaux.

L’équipe a encore l’intention de tester des thérapies d’ingénierie tissulaire, technologie qui vise à placer in situ des implants vivants osseux et cartilagineux comprenant des biomatériaux et susceptibles de provoquer le développement de nouveaux tissus articulaires chez les patients. Le projet bénéficie du soutien du Conseil européen de la recherche par le biais d’une bourse ERC Consolidator Grant.

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