Ouvrir la réforme des soins de première ligne au débat public (Dr David Simon)

Bien qu’elles vous ont parfois surpris voire irrités, mes nombreuses interventions sur les positions que l'ABSyM défend ont pour vocation de vous alerter sur les périls qui menacent la médecine générale, de vous assurer de notre engagement à vos côtés pour y faire obstacle et de vous présenter les projets que nous portons pour améliorer la pratique des médecins généralistes et la santé de nos patients. 

C’est à l’assemblée générale de la Fédération des Associations des Généralistes de la région Wallonne ( FAGW ) que j’ai pris connaissance des projets que le GBO nourrissait en toute discrétion.  Cette découverte m'a décidé à me rapprocher de l’ABSyM.  J’y ai été immédiatement autorisé à participer aux réflexions internes. Je fus proposé par l’ABSyM Wallonie au conseil d’administration fédéral puis invité à participer aux réunions du comité directeur. Ceci m’a permis de comprendre des réalités que j’avais pressenties mais dont je n’avais pas pris la mesure de la gravité.  Jacques de Toeuf se tient depuis le premier jour à mes côtés pour répondre avec précision, clarté et exhaustivité à toutes les questions que je lui pose, même les plus dérangeantes.  

Devenu le représentant de l’ABSyM au conseil d’administration de la FAGW, j’y ai constaté que le GBO se montre obsédé par ce que l'on nomme pudiquement la « multidisciplinarité ».  Il ne s’agit ni plus ni moins que l’ouverture des compétences des généralistes aux autres professionnels des soins de santé. Il réclame pour y parvenir une modification de la loi sur l’exercice des professions de soins de santé.  Celle-ci définit l’exercice illégal de la médecine et garantit que l’exercice des compétences de la médecine générale est la chasse gardée des médecins généralistes.  Dans un communiqué récent, faisant alliance avec son homologue néerlandophone, Alliantie Artsenbelang – Domus Medica (AADM), le GBO est enfin sorti du bois pour soutenir l’Association des Pharmaciens Belges (APB) qui réclamait que les pharmaciens acquièrent le droit de vacciner.  Vous avez sans doute appris que le GBO, l’APB et l’AADM sont parvenus à leurs fins il y a quelques jours.  Le Parlement a voté en urgence une loi proposée par Franck Vandenbroucke qui autorise désormais les pharmacien à vacciner. D’autres compétences suivront, gagnées une à une par les pharmaciens mais aussi par les infirmiers, les kinésithérapeutes, les dentistes, et bien d’autres encore. 

Pour financer la multidisciplinarité, le GBO promeut les « financements transversaux », en d’autres termes, le partage de nos honoraires avec les autres professions de soins.  La transversalité va absorber une part croissante de nos revenus.  En 2022, la marge budgétaire (ce qui n’a pas été dépensé du budget 2021) et la norme de croissance (l'augmentation du budget permise par une projection de l’évolution de l’indice santé) lui seront intégralement destinées. Alors qu’elles auraient pu être en partie utilisées pour majorer nos honoraires.  Luc Herry, président de l'ABSyM, a au contraire ferraillé sans fléchir ces dernières semaines dans les négociations médico-mutualiste pour qu’en 2023 et 2024 la norme de croissance garantisse la majoration des honoraires de consultation pour arriver fin 2024 à 30 euros. 

Dans la Plate-forme de Première Ligne Wallonne (PPLW), toutes les professions de soins de santé sont représentées avec une parité de voix. On y discute actuellement d'une refonte du paysage des institutions de la première ligne.  Les cercles risquent d'être contraints de fusionner avec d'autres structures telles que les SISD et les RML avec lesquelles ils seraient obligés de partager leur budget.  Le GBO ne s’oppose pas à cette dynamique contrairement à l’ABSyM qui veille à ce que le médecin généraliste garde main, ce qui lui vaut la réputation d'être « corporatiste ». 

Si l’approche de l’ABSyM pour l’organisation de la première ligne est de défendre la liberté de choix du médecin généraliste et sa place centrale dans le réseau des soins de santé de première ligne, celle du GBO est de le marginaliser à la périphérie d’une nébuleuse de professionnels des soins de santé où les médecins généralistes perdront tout pouvoir de décision. 

Que vous partagiez l’approche de l’ABSyM ou celle du GBO, vous conviendrez que la révolution qui se prépare ne peut pas continuer à se dérouler à l’abris du regard des médecins généralistes de terrain mais dans un débat public qui leur permettra de prendre part aux décisions. 

Je vous présente mes meilleurs voeux pour 2022, votre santé et celle de vos proches avant tout mais aussi une médecine générale libre de ses choix avec le généraliste au centre du réseau des soins. 

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Derniers commentaires

  • Anne RUELLE

    03 janvier 2022

    Je suis totalement d,'accord avec cette manière de voir!le médecin doit rester celui qui est choisi par le patient et qui décide a qui il le confie pour des soins si necessaire