Justice: c’est au patient de prouver qu'il n'a pas été informé par son médecin

La Cour de cassation a rendu un arrêt important sur la question de savoir qui du patient ou du prestataire de soins doit prouver que le consentement éclairé a été donné… ou pas.

Après un premier jugement sensationnel en 2015, où la charge de la preuve semblait avoir été transférée au prestataire de soins de santé (Médecins...), la Cour de Cassation annonce maintenant que « c'est le patient qui doit prouver que le consentement éclairé ne lui a pas été donné »

La table d'un scanner

Tout a commencé avec l'affaire d'une patiente qui est tombée lors d’un examen à hôpital d’ Hasselt (Jessa Ziekenhuis) en 2009…

Après avoir subi un scanner, l'infirmier de service aurait retiré la table du scanner et aidé le patient, à ce moment-là en position assise, à se lever de la table d’examen. Ensuite, elle aurait quitté la pièce sans placer la table du scanner dans une position plus basse. Lorsque la patiente se leva, elle glissa de la table en se brisant la cheville. La patiente a accusé l'infirmier de ne pas l'avoir informée: elle aurait dû dire qu'elle devait s'asseoir un moment jusqu'à ce qu'elle abaisse la table et l'aide à se lever. L'infirmier a ensuite affirmé qu'elle l'avait informée. Leurs déclarations étaient donc contradictoires.

Avis contradictoire

La Cour d'appel d'Anvers a jugé qu'en cas de déclarations contradictoires, la charge de la preuve incombait au prestataire de soins: il devait prouver qu'il l'avait dit. À cet égard, la Cour d'appel s'est référée au jugement de 2015. Selon de nombreux experts, cela semblait imposer la charge de la preuve au prestataire de soins.

Pourtant, dans un arrêt du 11 janvier 2019 que Le Spécialiste a pu examiner, la Cour de cassation, affirme que c'est le patient qui doit prouver qu'il n'a pas été informé !

Pourquoi ce changement ? La Cour de cassation motive son avis : "Depuis le jugement du 25 juin 2015, la charge de la preuve est très incertaine. (...) La partie qui invoque l'existence d'une erreur est donc dans l'obligation de fournir des informations pour prouver l'existence de cette erreur. » La Cour de cassation annule donc le jugement et renvoie les parties devant une autre cour d'appel (Gand).

Maître Christophe Lemmens explique que si l'on veut continuer à plaider devant la cour d'appel de Gand, ce tribunal doit tenir compte du jugement de la Cour de Cassation. "Strictement parlant, cet arrêt de la Cour de cassation n'est pas contraignant, mais il pousse à la réflexion sur cette question. Les chambres de cassation néerlandophones et francophones vont devoir ensemble prendre une décision définitive."

Le patient de nouveau en question

Le débat s’oriente donc à présent clairement vers le patient à qui il incombe d'apporter la charge de la preuve. Cette interprétation de la Cour de cassation ne peut manquer d'interpeller...Qu'en est-il alors de la loi sur les droits des patients qui stipule que le prestataire de soins de santé a une obligation d'information? Cela s'applique toujours ! Toutefois, si un patient prétend qu'un prestataire de soins de santé ne s'est pas conformé à son obligation de fournir toutes les informations, la règle de base est maintenant qu'il doit le prouver.

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Derniers commentaires

  • Denis GILLET

    06 février 2019

    Indépendamment du fait peu contestable qu'il n'existe pas de "Cour de Cassation d'Anvers" (il n'y en a qu'une) le problème posé ici porte sur un accident qui ne me semble pas directement lié au risque thérapeutique impliquant l'information du patient.
    Ici on est probablement en droit commun avec l'obligation pour la victime de prouver la faute.