Virus Usutu : un premier cas d'infection humaine dans le Sud de la France

Après la dengue, le zika et le chikungunya, voici le virus Usutu. Yannick Simonin et son équipe de l'Université de Montpellier viennent de rapporter le premier cas d'infection humaine par ce virus en France. Transmis par la piqûre d'un moustique extrêmement courant dans nos contrées – le Culex –, ce virus semble avoir un tropisme neuronal très important. Qu’en penser?

Le virus Usutu a été identifié en 1959 en Afrique australe, au Swaziland, près de la rivière Usutu (d'où son nom). On le trouve habituellement dans divers pays africains tels que le Sénégal, le Nigeria, l’Ouganda, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire ou le Maroc, où il infecte principalement les oiseaux migrateurs, comme les merles noirs, les mésanges, les moineaux, les rouges-gorges et quelques rapaces, dont la chouette et le hibou. Il n’avait jamais vraiment attiré l’attention. Comme avec le virus Zika, tant que ces agents circulent sans déclencher de réels problèmes sanitaires, on s’y intéresse peu…

En 2015, le constat d'une importante mortalité affectant les oiseaux – essentiellement des merles – autour du Rhône avait cependant intrigué les chercheurs. Les analyses ont alors montré que ces volatiles étaient infectés par Usutu. Comme le virus est connu pour être transmis par la piqûre du moustique le plus commun en France, Culex pipiens, des prélèvements de moustiques ont été réalisés dans le même temps en différents points de Camargue (gros foyer d’oiseaux migrateurs et de moustiques). Tous les sites testés se sont révélés positifs. Ce qui était une surprise, car Usutu était encore considéré comme rare en Europe.

Les chercheurs se sont dit que si le pathogène est répandu chez des oiseaux et des moustiques communs, il est probable qu’il infecte également l’homme, qui est un hôte accidentel potentiel. Ils ont donc procédé à l’analyse rétrospective (PCR) d’échantillons de liquide céphalo-rachidien de patients atteints de troubles neurologiques hospitalisés aux CHU de Nîmes et de Montpellier entre mai et novembre 2016, une période propice aux piqûres de moustiques. Les chercheurs ont retrouvé la trace du micro-organisme dans les prélèvements d’un patient âgé de 39 ans, admis en novembre 2016 au Service de Neurologie de Montpellier pour une soudaine paralysie faciale de présentation plutôt atypique. Celui-ci était sorti de l’hôpital au bout de trois jours, sans diagnostic précis, après régression spontanée des symptômes.

D’autres cas ont été recensés en Europe, dont 10 en Italie et 3 en Croatie. Ces patients présentaient des encéphalites ou méningo-encéphalites. Mais le nombre de personnes infectées est certainement plus important, car l’infection n’est que sporadiquement symptomatique, comme de coutume avec les arbovirus et parce qu’on ne trouve que ce que l’on cherche, or, l’hypothèse d’une infection par Usutu n’était jusqu’il y a peu pas même évoquée. La bonne nouvelle est que le virus ne semble pas se transmettre d'homme à homme. Il n'y a donc a priori pas de risque de contamination. La mauvaise est que virus circule activement – son vecteur est largement disséminé – et il est d’ailleurs à l’origine d’une mortalité aviaire importante dans certaines zones comme la Belgique (par atteinte neurologique). On a même recensé des décès dans des zoos, y compris des rapaces. Une autre mauvaise nouvelle est qu’Usutu, à l’instar de tous les virus à ARN, mute rapidement. Ce qui maximise le risque de voir surgir une mutation qui confère un avantage sélectif au micro-organisme. C’est ce qui était arrivé au virus Zika en 2013 avec une mutation responsable des malformations congénitales observées durant l’épidémie de 2015-2016. En attendant, il n’y a pas d’épidémie à ce jour, ni de risques majeurs de santé publique avérés.

 

Comment reconnaître le moustique Culex?

Le moustique Culex transmet des maladies graves comme la fièvre du Nil occidental ou l’encéphalite japonaise, ainsi que le virus Usutu. Il est à distinguer de l’anophèle, tristement célèbre pour véhiculer le paludisme et de l’Aedes (dont fait partie le moustique tigre) qui est, lui, vecteur de la dengue, du Chikungunya et du Zika.

Le Culex ne ressemble pas au moustique tigre

Tout comme le moustique tigre, le Culex aime les eaux plutôt chaudes et stagnantes et il est capable de piquer en pleine journée (à la différence de l'anophèle qui ne pique que la nuit). Il est donc nécessaire de se protéger en théorie 24 heures sur 24, d’où l’intérêt d’éliminer les gîtes larvaires de l’habitat, c’est-à-dire la moindre source d’eau stagnante, où les femelles pondent leurs œufs.

 

  • Simonin Y, et al. Emerg Infect Dis. 2018;24(5):875-8. https://dx.doi.org/10.3201/eid2405.171122

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