Hausse du ticket modérateur « inenvisageable » ? Les chiffres racontent une autre histoire

La discussion autour du ticket modérateur se tend. Tandis que les syndicats médicaux plaident pour une augmentation de la contribution des patients, les mutualités maintiennent une ligne dure. « Inenvisageable », déclare Luc Van Gorp, président de la Mutualité chrétienne (CM). Mais selon Thomas Gevaert, président du Cartel, cette position tient peu compte des données disponibles.

D’après les chiffres récents de l’INAMI, les tickets modérateurs ont diminué au cours des dix dernières années, en termes relatifs comme en valeur absolue. En 2024, le volume total des honoraires médicaux s’élève à 11,5 milliards d’euros. De ce montant, 91,9 % sont couverts par l’assurance maladie et seulement 8,1 % par les patients. Dix ans plus tôt, la répartition atteignait encore 90,2 % contre 9,8 %.

Le recul est particulièrement marqué dans la catégorie « consultations et visites », qui représente 58,2 % de l’ensemble du ticket modérateur. La part à charge du patient y est passée de 19,9 % en 2015 à 13,8 % en 2024.

Thomas Gevaert estime dès lors que la contribution des patients est loin d’être une charge en croissance. Il juge intenable que les mutualités bloquent systématiquement toute discussion sur une indexation ou une adaptation. « Dire que c’est inenvisageable ne correspond pas à l’évolution des chiffres », affirme-t-il.

Le Cartel et l’ABSyM avaient déjà souligné plus tôt le potentiel financier d’une indexation limitée. Selon leurs calculs, l’indexation du ticket modérateur pour les consultations de médecine générale pourrait à elle seule générer au minimum 114 millions d’euros. Cette somme contribuerait directement à la stabilité et à la pérennité des soins de première ligne.

Les syndicats médicaux plaident pour que la discussion ait au moins lieu, dans un contexte où les médecins sont confrontés à la hausse de leurs coûts, à une charge de travail croissante et à des économies budgétaires. Le ministre de la Santé, Frank Vandenbroucke, se dit d’ailleurs disposé à entrer en matière sous certaines conditions.

Mais les mutualités rejettent avec fermeté toute augmentation du ticket modérateur. Luc Van Gorp le qualifie de « taxe déguisée sur les plus vulnérables ». Il avertit qu’une hausse toucherait en premier lieu les patients chroniques et les ménages à faibles revenus, mettant en péril l’accessibilité des soins.

Les Mutualités socialistes s’alignent sur cette position. Pour elles, le ticket modérateur est un mécanisme qui ne doit pas être alourdi, en particulier dans les soins de médecine générale – la première porte d’entrée du système. Solidaris estime que les réformes doivent viser l’efficacité, la qualité et la lutte contre la surconsommation, plutôt qu’une augmentation de la contribution financière des patients.

Affaire à suivre.

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Derniers commentaires

  • Charles KARIGER

    06 octobre 2025

    Aucun autre pays que la Be n'a conçu et exonéré un système aussi inutile, pervers et nuisible que nos "mutualités". (Qui ne sont pas des assureurs contrairement aux mutuelles françaises par exemple.)
    Ce fut insensé et infiniment néfaste d'avoir politisé (dès 1946) l'intermédiation entre les citoyens et notre UNIQUE assureur maladie-invalidité.
    L'INAMI pourrait ouvrir un guichet dans chaque bureau de poste (la diminution du courrier postal a créé de la place). Quelle économie ! Mais, bien sûr pas pour les "petits copains"...!

  • Olivier DELAERE

    06 octobre 2025

    Supprimons les mutuelles