Frank Robben, Big Brother ? : « Je suis prêt à m’expliquer au Parlement »

Ministry of Privacy, une organisation néerlandophone qui milite pour protéger la vie privée des citoyens, vient d’attribuer ses premiers Privacy Awards dont le « Big Brother de l'Année », une catégorie pour les personnes ou organisations moins respectueuses de la vie privée. Le prix a été attribué à Frank Robben, managing director de Smals, general manager de la Banque-Carrefour de la Sécurité Sociale et general manager de la plate-forme eHealth, et au coeur du projet Coronalert. Il est aujourd’hui aussi questionné pour l’obtention du marché par la société Doclr dans la gestion du testing et de la vaccination. 
Vous êtes attaqué de partout, comment réagissez-vous ?
« On dit que je suis juge et partie. J’ai toujours dit, depuis le début, que tous les projets étaient contrôlés par les comités de gestion. Pour le projet e-health, il y a des représentants des médecins, des pharmaciens, des mutuelles...Chaque projet que l’on fait est validé par d’autres. Je ne suis pas le seul aux manettes. Je ne peux pas décider tout seul. Cela voudrait dire que toutes les personnes qui sont dans les comités de gestion depuis 30 ans ne font pas leur travail. Je n’ai pas de double agenda. J’aime que les soins de santé soient de qualité.”
Avez-vous des conflits d’intérêts ?
“Quand il y a un dossier où je suis impliqué, je ne participe pas à la délibération. Je ne suis pas dans des firmes privées. Je n’ai pas d’ actions. Contre quoi dois-je me défendre ? Mon site est hypertransparent sur ce que je fais”
Mais vous avez beaucoup de mandats
“Presque tout ce que je fais provient de mon travail à la banque Carrefour et à la Smals. Les autres mandats en découlent. Certains disent que j’ai 15 mandats. J’ai trois fonctions et les autres en découlent.” 
On veut votre tête?
« Je n’en sais rien. J’essaie toujours d’être positif et constructif. Je m’occupe depuis 30 ans de ce secteur. On n’a jamais eu de plaintes à propos de données qui auraient été utilisées à des mauvaises fins. J’ai l’impression que maintenant avec la RGPD, il y a des gens qui s’inquiètent... et qui ont peur que je fasse n’importe quoi.”
Cela pourrait être le cas?
“Je demande que l’on me laisse m’expliquer. Je suis prêt à tout expliquer au Parlement. Je ne demande pas mieux. . Je suis un scientifique. Je suis transparent. Je veux aider à améliorer le système.”
Vous en avez assez? 
“Ma femme me dit qu’à ma place, elle aurait quitté la fonction. Je ne veux pas être celui qui laisse un mauvais système en place. C’est pour cela qu’on a un système de sécurité de l’information qui permet de faire une analyse des risques multidisciplinaires avec des gens que je ne connaissais pas auparavant.”
Cela se passe bien avec le ministre Vandenbroucke?
“Oui tout se passe bien. J’ai encore parlé avec lui ce matin. C’est aussi un scientifique.”
Les médecins peuvent-ils avoir confiance dans la sécurisation des données aujourd’hui ?
« Dans la base de données centrales, on ne met aucune donnée de santé. On a même , par sécurité, donné un code de vaccination à tous les Belges. On a réfléchi à cela. On peut même dans la Phase 1B, quand on va inviter en priorité les gens avec des comorbidités, inviter aussi 10% de gens sans comorbidité comme cela un employeur ne pourra pas déduire si vous êtes malade ou pas.. Il faut être créatif. Aujourd’hui, on peut s’étonner qu’un jeune avec une mucoviscidose ne soit pas vacciné avant un homme de 60 ans en pleine forme qui court encore un marathon sans problème. Ce n’est pas à moi de fixer les priorités. Ce sont des questions éthiques. C’est le conseil supérieur de la santé qui décide, et nous, on adapte notre système informatique.”
Que répondez-vous à propos de la critique contre la société Doclr ?
« Trois firmes ont répondu à l’appel d’offres. Une société coûtait le double et ne répondait pas aux attentes. Il en restait deux. Doclr et une autre. Cette autre société avait un logiciel qui était à prendre ou à laisser. Il n’y avait pas moyen d’avoir accès aux développeurs. Doclr avait un produit qui avait déjà de bons résultats. On a évalué cela avec les Communautés et Régions et on a décidé ensemble de le faire. « 
Vous n’avez pas décidé tout seul?
“Mais non. Depuis avril, je travaille 16 h par jour. J’ai pris en tout deux jours de vacances quand mon troisième petit enfant est né. Je suis volontariste. Il n’y a pas un jour où on ne met pas quelque chose en production.”
La vaccination va aller mieux?
“Le débat sur la vaccination est tellement émotionnel. Dès qu’il y a quelque chose qui n’est pas idéal, tout se complique. Au niveau informatique, on ne peut pas tous les jours adapter les logiciels. En Flandre, les 90 centres n’ont pas de problème. Sans en faire un problème communautaire, cela paraît plus compliqué du côté francophone. 
Un souci dans les invitations ?
“Automatiquement, les gens vont recevoir une lettre, un sms ou un email. En Flandre, ils ont décidé qu’on ne choisissait pas son centre: moi j’habite près de Louvain, mais je ne peux pas aller à Louvain, mais à Kortenberg. C’est un peu plus loin, mais l’important, c’est que je sois vacciné. A Bruxelles, il n’y a pas de prébooking. On laisse choisir les gens. Par ailleurs, on cherche actuellement un système intelligent pour remplir à la fin de la journée  les centres. Un lastminute booking. Evidemment, cela ne doit pas devenir la règle.”
Le tracing va mieux? 
“On a dû mettre en place un système nouveau, mais depuis septembre cela se passe bien. Depuis trois mois, je n’entends plus de problème.  Cela n’avait rien avoir avec les chiffres que l’on avait auparavant avec la tuberculose. On manquait d’expérience. Au début, on a commencé avec un produit minimal.»
Que se passe-t-il à la commission vie privée, l’APD ?
« J’ai 60 ans. J’essaie toujours de garder un équilibre avec les droits fondamentaux. On est toujours dans l’analyse des risques. On le fait toujours de manière multidisciplinaire. On met en place des systèmes de cryptage avec des clés de cryptages suffisamment sécurisées. Ce ne sont pas des médecins ou des avocats qui vont dire quels types de cryptages nous devons utiliser pour protéger au mieux. Je n’interviens jamais dans la commission vie privée. »

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