France: les avocats des parents vérifient la reprise des traitements de Vincent Lambert

Les avocats des parents du Français Vincent Lambert sont attendus mardi matin au centre hospitalier de Reims pour vérifier la reprise, au moins provisoire, des traitements de ce tétraplégique en état végétatif depuis dix ans, ordonnée, à la surprise générale, par la cour d'appel de Paris.

Cet énième coup de théâtre, intervenu lundi soir dans une affaire qui a déjà connu de nombreux rebondissements judiciaires depuis 2013, a été fêté par la mère de Vincent Lambert, Viviane, qui a salué auprès de l'AFP «une très grande victoire» tandis que son neveu François, favorable à l'arrêt des traitements, a dénoncé du «sadisme pur».

La nouvelle est tombée en pleine marche parisienne réunissant plusieurs centaines de personnes réclamant «la vie pour Vincent». Une énorme clameur a retenti quand l'un des deux avocats des parents, Me Jérôme Triomphe, a lancé à la foule, en apprenant leur victoire par téléphone: «On a gagné!»

«Jérôme Triomphe et moi-même irons dès demain matin à Reims pour nous assurer que l'alimentation et l'hydratation seront effectivement reprises», a ajouté son collègue, Me Jean Paillot, soulignant qu'il ne s'agissait que d'une «décision provisoire» d'une «durée de six mois, permettant au comité de l'ONU d'étudier le dossier».

De fait, la cour d'appel de Paris a «ordonné à l'Etat français (...) de prendre toutes mesures aux fins de faire respecter les mesures provisoires demandées par le Comité international des droits des personnes handicapées le 3 mai 2019 tendant au maintien de l'alimentation et l'hydratation» de Vincent Lambert, selon la décision consultée par l'AFP.

Le Comité international des droits des personnes handicapées de l'ONU (CDPH) avait demandé à la France de surseoir à l'arrêt des traitements dans l'attente d'un examen du dossier sur le fond. Mais la France considérait que la suspension de l'arrêt des traitements préconisée par le CDPH «est dépourvue de caractère contraignant», mettant en avant le «droit du patient à ne pas subir d'obstination déraisonnable».

Le centre hospitalier de Reims avait déjà lancé puis stoppé deux procédures d'arrêt des soins, l'une portée par le docteur Eric Kariger en 2013, l'autre par son successeur, le docteur Daniéla Simon en 2015.

La nouvelle interruption des traitements, couplée à la mise en oeuvre d'une «sédation profonde et continue», avait débuté lundi matin, conformément à une décision médicale signée par le docteur Vincent Sanchez en avril 2018, soutenue par une partie de la famille dont son épouse Rachel Lambert et validée par le Conseil d'Etat fin avril.

Jusqu'à présent, tous les ultimes recours déposés par les avocats des parents -Cour européenne des droits de l'Homme, tribunal administratif- avaient échoué. Et le président Emmanuel Macron, à qui ils avaient écrit samedi pour l'implorer d'intervenir, avait répondu lundi qu'il ne lui «appartenait pas de suspendre» l'arrêt des traitements, décidé, «en conformité avec nos lois».

La famille est coupée en deux camps, d'un côté autour de ses parents, fervents catholiques opposés à l'arrêt des traitements, de l'autre autour de son épouse Rachel et son neveu François, qui entendent mettre fin à cet «acharnement thérapeutique» et affirment que l'ex-infirmier avait pris position contre tout acharnement thérapeutique. Vincent Lambert n'a pas laissé de directive anticipée écrite mais sa femme est sa tutrice légale.

Une scission familiale encore nettement perceptible lundi soir. «On était en train d'éliminer Vincent! C'est une très grande victoire! Ils vont le réalimenter et lui redonner à boire. Pour une fois, je suis fière de la justice», jubilait sa mère.

«On nous refait le coup tout le temps. Il y a une jouissance de la part de ceux qui font tous ces recours. C'est du sadisme pur de la part du système médico-judiciaire», dénonçait au contraire François Lambert. Face à cette décision «incroyable» de la cour d'appel, il a évoqué auprès de l'AFP un possible pourvoi en cassation du centre hospitalier.

Président de l'association du Droit à mourir dans la dignité, Jean-Luc Romero a déploré lundi soir «un acharnement des parents, Vincent Lambert se retrouvant au milieu d'une affaire qui le dépasse».

«J'espère qu'à la suite de ce jugement (...) on transférera enfin et rapidement Vincent Lambert dans un service adapté aux personnes en état paucirelationnel (état de conscience minimal, NDLR)», a réagi pour sa part sur Twitter la psychologue Marie de Hennezel, spécialiste de l'accompagnement de la fin de vie.

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