France: arrêt des soins pour un patient en état végétatif, dans un climat passionnel

L'arrêt des soins a commencé lundi matin pour Vincent Lambert, un patient en état végétatif depuis plus de 10 ans, devenu le symbole du débat passionnel en France sur la fin de vie et d'une bataille juridique acharnée qui se poursuit depuis six ans.

"C'est une honte, un scandale absolu, ils n'ont même pas pu embrasser leur fils", a réagi auprès de l'AFP Me Jean Paillot, avocat des parents, farouchement opposés à l'interruption des traitements, en annonçant le début de l'arrêt des soins, qui a commencé lundi matin à l'hôpital Sébastopol de Reims (nord-est), sur décision du médecin Vincent Sanchez.

"C'est des monstres! Des monstres! C'est des nazis! ", a lancé depuis une voiture Viviane Lambert, la mère de Vincent, en passant devant le CHU (centre hospitalier) de Reims.

Le Dr Sanchez, "en violation de tous ses devoirs et de ce qu'il avait laissé croire, vient d'annoncer à la famille qu'il avait initié le processus de mort sans préavis, sans tenir compte des recours, sans tenir compte des mesures provisoires. (...). Le coup de force continue. Il est encore temps d'arrêter cette folie", ont également affirmé dans un communiqué Me Paillot et Me Jérôme Triomphe, autre avocat des parents.

"L'arrêt des traitements" et "la sédation profonde et continue" ont été "initiés ce matin", a écrit le Dr Sanchez, chef de service des soins palliatifs, dans un courriel à la famille dont l'AFP a obtenu copie.

Validée par le Conseil d'Etat fin avril, l'interruption des soins prévoit, selon une source médicale, l'arrêt des machines à hydrater et alimenter ainsi qu'une sédation "contrôlée, profonde et continue" de cet homme aujourd'hui âgé de 42 ans, ainsi qu'une prise d'analgésiques "par précaution".

Mais l'éprouvante bataille juridique et morale qu'est devenue "l'affaire Lambert" n'est pas terminée.

Les avocats des parents ont annoncé dimanche trois nouveaux "recours" contre cette décision, visant notamment le Dr Sanchez, dont ils réclament la radiation, et qui a annoncé le 10 mai à la famille l'arrêt des traitements pour la semaine du 20 mai. Sur la radio RTL lundi matin, Me Paillot a évoqué avoir saisi le Conseil d'Etat, la Cour européenne des droits de l'homme et "être sur le point de saisir la cour d'appel de Paris".

Il s'agirait de la quatrième procédure en six ans dans cette affaire qui déchire la famille de Vincent Lambert, tétraplégique et plongé dans un état végétatif depuis un accident de la route en septembre 2008.

Dimanche, une manifestation a été organisée devant l'hôpital, où une centaine de personnes ont scandé "Vincent n'est pas en fin de vie" et dénoncé, à l'instar de Viviane Lambert, sa mère, "une euthanasie déguisée".

Samedi, les parents avaient exhorté dans une lettre ouverte le président Emmanuel Macron à intervenir pour le maintien des traitements. Ils s'appuient notamment sur une demande vendredi d'un organisme de l'ONU, le Comité international des droits des personnes handicapées (CIDPH), demandant de nouveau à la France de ne pas suspendre les soins dans l'attente de l'examen du dossier sur le fond.

Mais Paris répète que ces mesures conservatoires "sont dépourvues de caractère contraignant" et met en avant le "droit du patient à ne pas subir d'obstination déraisonnable".

Face à ceux qui s'opposent à l'arrêt des soins, la femme de Vincent Lambert, Rachel, son neveu François et cinq frères et soeurs du patient, dénoncent depuis des années un acharnement thérapeutique.

Le patient, ancien infirmier, n'a pas laissé de directives anticipées. Son épouse et son neveu affirment qu'il avait pris position contre tout acharnement thérapeutique.

L'arrêt des soins de Vincent Lambert s'inscrit bien "dans le cadre de la loi", a estimé dimanche Jean Léonetti, père de la loi régissant la fin de vie en France. Il a également estimé que cette décision est "d'autant plus douloureuse" pour les parents "qu'elle est tardive".

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