Remboursement de médicaments: de l’offre à la demande

A l’instigation de l’Inami, le KCE s’est penché sur une nouvelle approche dans les décisions de remboursement des médicaments, permettant de davantage tenir compte des attentes prioritaires des patients. Le Centre d’expertise souligne le côté pionnier de cette implication accrue des citoyens dans des décisions de politique de santé.

Voilà plusieurs années que le KCE, mandaté par l’Inami, s’intéresse aux critères que les citoyens estiment déterminants lorsqu’il s’agit de décider de rembourser des interventions de santé, dont les médicaments. Il s’est notamment appuyé, dans sa réflexion, sur les conclusions du LaboCitoyen mené par la Fondation Roi Baudouin. Il ressortait par exemple des travaux que les Belges accordent davantage d’importance à limiter l’impact d’une maladie sur la qualité de vie (en ce compris la qualité de vie des proches du malade) et les inconvénients liés aux traitements existants qu’à la prolongation de la vie.

Aujourd’hui, le KCE propose une première mise en pratique de cette logique participative, avec une méthodologie à appliquer lors de la détermination des besoins médicaux non recontrés – qui d’ailleurs ne sont pas toujours liés au développement de médicaments. Le fil rouge? Plutôt que de s’inspirer fortement, comme c’est le cas actuellement, des produits en attente dans le pipeline de l’industrie pharmaceutique, il s’agit d’établir l’inventaire des besoins en tenant explicitement compte des préférences des citoyens-patients. Un exercice participatif qui est suivi avec attention à l’étranger, affirme le KCE.

Mais que sont les «besoins médicaux non rencontrés»? Depuis deux ans, pour éviter aux personnes gravement malades de devoir attendre longtemps un traitement innovant à prix abordable, au vu des multiples étapes précédant la commercialisation d’un médicament, la Belgique autorise temporairement, sous conditions, la mise sur le marché et le remboursement de certains médicaments. Cette facilité s’active si la maladie affecte gravement la qualité de vie ou les chances de survie du patient et, nous y voilà, qu’elle figure sur une liste dite des «besoins médicaux non rencontrés». L’an dernier, en vue de la première élaboration de cette liste, une quarantaine de demandes d’y faire figurer telle ou telle spécialité ont été introduites par les entités habilitées: des fabricants, la ministre ou un collège de l’Inami, rapporte le KCE.

Une analyse décisionnelle multicritères

La définition annuelle de cette liste, assumée par une commission spécifique de l’Inami, est délicate, dit-il, puisqu’il faut jauger, évaluer, comparer… toutes les «maladies-candidates».  A l’issue d’un premier test-pilote dont les résultats sont d’après lui «encourageants», le KCE annonce avoir développé «une méthode scientifique permettant d’effectuer cet exercice de façon transparente et cohérente, en attribuant à chacune de ces maladies un score qui permet de les classer par ordre de priorité». 

Il s’agit d’une forme de MCDA, une analyse décisionnelle multicritères, appliquée au classement des pathologies. Pour faire bref, la notion de «besoins médicaux» cède devant celles de «besoins thérapeutiques» (ceux qui existent du point de vue du patient, parce que les traitements déjà remboursés sont trop lourds, par exemple) et de «besoins sociétaux» (qui reflètent le souhait de la collectivité de disposer, par exemple, d’un meilleur traitement pour une maladie très courante, ou meilleur marché pour ne pas plomber les dépenses de l’AMI). Ces besoins ont reçu une pondération reflétant les constats établis lors des travaux précédents sur les priorités citoyennes (lire plus haut).

Le KCE ajoute que les patients, les prestataires de soins et d’autres acteurs concernés devraient également pouvoir formuler de nouvelles propositions d’inscription sur la liste (et pas uniquement l’industrie et les autorités sanitaires). «Il faudrait aussi rendre possible le remboursement d’autres types d’interventions novatrices, par exemple dans le domaine de la chirurgie, de l’organisation des soins ou des soins de soutien.» D’après le KCE, la méthode a été bien accueillie par l’Inami, «qui a déjà déclaré qu’il allait la mettre en œuvre dans la procédure des besoins médicaux non rencontrés». 

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