Le cri des MG suisses: «Nous sommes là pour vous!»

En Suisse, le 1er avril est décrété, depuis une dizaine d’années, «Journée de la médecine de famille». C’est l’occasion pour un organe de défense professionnelle comme MFE (Médecins de famille et de l'enfance Suisse) de sensibiliser l’opinion à la situation de la profession. Pour la décennie à venir, on y pronostique une perte, en temps de travail, de plus de 60%.

MFE est le fruit de la fusion, en 2009, de trois sociétés de «médecins de premier recours»: les spécialistes en médecine générale, en médecine interne et en pédiatrie. Son credo, c’est qu’une médecine de première ligne forte est avantageuse pour tous: la santé de la population, sa qualité de vie, les coûts du système de soins… Tout cela dépend directement de l'importance qui est accordée aux MG par rapport à la médecine spécialisée, affirme MFE.

A l’approche de la désormais traditionnelle journée du 1er avril, qui se concrétisera notamment par un rassemblement de médecins sur une place de Lucerne pour proposer aux badauds différents dépistages, MFE a produit une affiche à placarder dans les salles d’attente, titrant «Nous sommes là pour vous!».

Il faut enfoncer le clou, estime l’association. «Nous devons impérativement et sans relâche démontrer combien notre contribution en faveur de la santé de la population suisse est importante, afin de pouvoir compter également sur son soutien à l’avenir [en 2014, une ‘votation’ populaire avait témoigné de l’appui de 88% des Suisses au maintien et à la valorisation des soins de base, médecine générale incluse, ndlr]. A cet effet, nos patientes et patients sont un élément essentiel. Personne d’autre ne peut témoigner de manière plus crédible de la qualité de notre travail.»

Malgré de premières mesures pertinentes (comme l’encouragement aux cabinets de groupe), la profession est menacée, alerte MFE. Le scénario n’est pas fondamentalement surprenant, pour qui suit la situation vécue dans certaines zones (du sud) de la Belgique. L’histoire commence par: «en 2005, la moyenne d’âge des MG suisses était de 51 ans…». Et la suite s’écrit toute seule: ce chiffre est passé en 2015 à 55. D’après MFE, à la campagne, les MG peinent déjà à se trouver un successeur, et dans les villes, la part d’habitants sans médecin traitant est alarmante (35% des gens s’adressant à un service d’urgences à Berne n’ont pas de généraliste, par exemple).

Un besoin de plus de 5.000 ETP

La plus récente des enquêtes «workforce» que MFE commandite régulièrement dans les milieux académiques, a mis des ordres de grandeur sur la problématique. La couverture médicale de base optimale pour une population est, si on se réfère au Health Project de l’OCDE, d’1 MG /1.000 habitants, rappelle MFE. En 2015-2016, il manquait déjà plus de 2.000 médecins de famille à plein temps (*) en Suisse pour atteindre ce taux, indique l’association. «Si l’on tient encore compte des médecins qui quittent le métier et de l’évolution démographique, et que l’on admet que 20% des étudiants en médecine choisiront la médecine de famille (**), le déficit à combler dans 10 ans sera de 60%, ce qui représente plus de 5.000 médecins de famille à plein temps.»

MFE réclame des mesures au niveau de la formation de la relève et de la promotion de la collaboration interdisciplinaire. Faute de quoi, ce sont «de grandes lacunes dans la couverture médicale de base» qui se profilent, avec à la clef «une charge financière énorme pour le système de santé».

(*) Cette même étude «workforce» indique également qu’aux yeux des jeunes MG, un taux d’activité de 70% est optimal.
(**) A Bâle, entre 2002 et 2008, la part d’étudiant(e)s déclarant avoir la médecine générale comme objectif professionnel n’a pas excédé les 12%. La désaffection tient essentiellement aux horaires lourds, dont les gardes, et à un revenu jugé insatisfaisant.

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