Giovanni Briganti : «Un examen d’entrée? Tout à fait inutile»

Giovanni Briganti est vice-président et coordinateur de la recherche au CIUM, le Comité inter-universitaire des étudiants en médecine. Il faisait partie des panelistes invités par le Fag wallon à son AG spéciale sur l’avenir de la médecine générale, samedi. Pour lui, l’examen d’entrée qui fera son apparition début septembre dans les facultés francophones est «tel qu’il va être organisé, tout à fait inutile».

«Un examen d’entrée, c’est binaire, cela donne: réussite ou échec. Ca ne limite pas vraiment le nombre d’étudiants qui vont pouvoir entamer le cursus et le terminer. Un concours, placé en fin de 1ère, était une vraie méthode de sélection en revanche.» Même tel qu’instauré en fin de première, décrié car générant des reçus-collés, et du reste invalidé par le Conseil d’Etat? «Ce n’est pas le mécanisme même du concours qui a été invalidé, ce sont les quotas fédéraux sur lesquels il reposait, qui ont été jugés illégaux. Donc ce n’est pas un geste de la Communauté française qu’on attend, c’est un geste du Fédéral. Il faut qu’il augmente les quotas sur lesquels se fonde la sélection.»

«Ce n’est pas illogique de réclamer cela.» Et le vice-président de sortir deux recherches, qu’il promet «tenir à la disposition de toute personne intéressée. Tout d’abord une étude du professeur Deliège, de l’UCL, en 2015, qui dit que d’après les quotas actuels, si on ouvre les vannes à tout étudiant en médecine, dans les 10 ans qui viennent, en Fédération Wallonie-Bruxelles, on remplacera 43% seulement des médecins qui vont partir à la retraite. En Flandre, laquelle a un examen d’entrée depuis 20 ans, ce taux s’élève à 150%. (…) Et ensuite une méta-analyse de Christian Léonard, du KCE, parue dans la revue Health Policy, qui démonte complètement le principe dogmatique qui sous-tend l’instauration du numerus clausus (NC) par le monde politique: il n’y a aucune relation établie entre l’offre en matière médicale et la consommation.»

Giovanni Briganti résume le point de vue actuel du CIUM. «Oui, il y a une pénurie dans certaines spécialités, dont la médecine générale. Pour le moment, une sélection, si justifiée, devrait s’accompagner d’une augmentation drastique des quotas du NC qui sont fixés chaque année.» La commission de planification avait demandé de modifier la répartition nord-sud des numéros Inami, qui est de 60/40, pour passer à 56,5/43,5, fait-il encore observer. «Mais finalement on est resté à 60-40. Le monde politique au fédéral, d’un coup, a balayé tous les arguments scientifiques.»

«Ancré dans le cortex du nord»

Commentaire du ministre Prévot, présent lui aussi à cette AG: «Ne l’oublions pas, tout ça, c’est un problème communautaire. Le fait d’avoir estimé nécessaire, dans les années 90, de mettre un goulet d’étranglement via le NC, tient du fantasme bien ancré dans le cortex du nord du pays selon lequel, dans le sud, nous serions des consommateurs impulsifs et abusifs de médications. Cela reste un élément extrêmement présent dans le mental des décideurs du nord, encore aujourd’hui, qui conditionne – et au-delà des éléments factuels! – leur ressenti. C’est comme la météo: il y a la température réelle et la température ressentie. Maggie De Block avait osé faire une proposition s’écartant de la clef habituelle de répartition 60/40; elle a dû rentrer dans le rang.» 

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